À Propos

Les trois notions de la durée, de la mémoire et de l’élan vital consti­tuent la réa­li­té de la vie dans son che­mi­ne­ment et dans son pro­grès. Selon Berg­son, l’ensemble de ces notions fon­da­men­tales décèle le conte­nu de la vie, et dégage la réa­li­té de ses rigi­di­tés de l’automatisme. L’élan vital est le moteur, l’origine et le motif de tous les mou­ve­ments. 

Démarche

Mélis­sa Trao­ré est une artiste d’o­ri­gine fran­co-came­rou­naise et malienne. Actuel­le­ment, elle réside et tra­vaille dans la Drôme au sein du tiers lieu de l’U­sine, une pépi­nière d’a­te­liers pour artistes et arti­sans à Poët-Laval. 

Son approche artis­tique inter­roge nos héri­tages, qu’ils soient visibles ou invi­sibles, en se concen­trant sur la notion de Mémoire. Elle explore aus­si bien l’héritage social, cultu­rel, arti­sa­nal que la trans­mis­sion des gestes. Son ins­pi­ra­tion se puise dans la lit­té­ra­ture, la socio­lo­gie et l’ethnologie. 

En amont de toute créa­tion, Mélis­sa Trao­ré choi­sit un sujet autant pour son his­toire, ses réso­nances que ses valeurs sym­bo­liques, puis s’inspire d’expériences vécues dans ses trois pays d’origine. L’idée de “l’élan vital” comme l’évoque Berg­son semble réson­ner dans son pro­ces­sus créa­tif. Elle ima­gine une forme ini­tiale de l’ob­jet plas­tique et réflé­chit à la manière dont il serait per­çu cultu­rel­le­ment dans cha­cun de ces trois pays. Par­tant de sa propre mémoire, qu’elle soit per­son­nelle ou cultu­relle, elle entre­prend ensuite un tra­vail de recherches — lec­tures, pho­to­gra­phie, écoute des acteurs liés à son sujet — voir une col­la­bo­ra­tion avec un scien­ti­fique. La forme finale tend ain­si à mettre en lumière la richesse sociale, cultu­relle ou arti­sa­nale de la thé­ma­tique qu’elle traite. 

Les ins­tal­la­tions de Mélis­sa Trao­ré où peuvent s’agencer arts visuels, sculp­ture, son ou vidéo sont le résul­tat de ren­contres entre un ques­tion­ne­ment socié­tal, des maté­riaux (natu­rels — indus­triels) et un espace. Son approche intui­tive lui per­met d’ex­plo­rer diverses formes tout en cher­chant à don­ner du sens et à éta­blir une esthé­tique en réso­nance avec le sujet qu’elle traite. Pro­fon­dé­ment connec­tée aux pra­tiques arti­sa­nales, Mélis­sa Trao­ré par­tage avec les arti­sans un pro­ces­sus créa­tif simi­laire, mar­qué par des gestes, des rythmes et une cer­taine forme d’in­tros­pec­tion. Son tra­vail rend hom­mage aux artisan(e)s et à leur savoir-faire, sou­li­gnant l’im­por­tance du geste et de l’ar­ti­sa­nat dans ses créa­tions. Dans ses œuvres, l’on peut retrou­ver des sym­boles emblèmes ou allé­go­riques ; ces der­niers visent à évo­quer les dif­fé­rentes cultures aux­quelles elle se réfère.

À tra­vers cette explo­ra­tion des héri­tages, le public est encou­ra­gé à réflé­chir sur ses liens sociaux et cultu­rels, ain­si que sur notre mémoire col­lec­tive. Il évo­lue au sein ou autour d’ins­tal­la­tions inter­ac­tives qui lui per­mettent de se dépla­cer libre­ment, plu­tôt que de res­ter pas­sif devant l’œuvre. Il peut ain­si s’im­mer­ger dans l’œuvre, comme s’il en fai­sait par­tie, et vivre une expé­rience qui lui per­met de s’ap­pro­prier une his­toire par­ta­gée.

1 NAVALI, Mah­moud. Élan vital chez Berg­son. Uni­ver­si­ty of Tabriz, Jour­nal Phi­lo­so­phi­cal Inves­ti­ga­tions. Vol 6, No. 11, Autumn & Win­ter 2012, p 121–128.

2 Hen­ri Berg­son était un phi­lo­sophe fran­çais du début du XXe siècle, connu pour ses idées sur le temps, la conscience et la créa­ti­vi­té. Il défen­dait l’idée que le temps ne soit pas sim­ple­ment une mesure quan­ti­ta­tive, mais une expé­rience qua­li­ta­tive, qu’il a appe­lée “durée”. Selon lui, la durée est la manière dont nous vivons le temps, en oppo­si­tion à la concep­tion méca­nique du temps. Berg­son a éga­le­ment mis l’ac­cent sur l’im­por­tance de l’in­tui­tion et de l’ex­pé­rience vécue, sug­gé­rant que la com­pré­hen­sion pro­fonde de la réa­li­té ne peut pas être atteinte uni­que­ment par la rai­son ou l’a­na­lyse intel­lec­tuelle. 

Biographie

Mélis­sa Trao­ré est une artiste fran­co-came­rou­naise-malienne. Née en 1990 au Came­roun, elle vit et tra­vaille aujourd’hui dans la Drôme. 

En 2010, elle obtient un mas­ter 1 en psy­cho­lo­gie à l’Université de Psy­cho­lo­gie Sciences Sociales de Cler­mont-Fer­rand. Par la suite, elle s’engage dans un Diplôme d’État d’éducatrice spé­cia­li­sée. En paral­lèle, elle tra­vaille en tant qu’aide psy­cho­lo­gique dans le cadre de pré­ven­tion au sui­cide de déte­nus en longue peine. C’est au cours de cette expé­rience qu’elle choi­sit de se ser­vir de l’art comme médium d’accompagnement. Elle exer­ce­ra auprès de per­sonnes en grande pré­ca­ri­té pen­dant 10 ans.

En 2022, Mélis­sa Trao­ré décide de pour­suivre sa pas­sion pour l’art et intègre un ate­lier au Centre d’Art de l’Usine situé en Drôme. Auto­di­dacte, ses ins­tal­la­tions où peuvent s’agencer arts visuels, sculp­ture, son ou vidéo sont le résul­tat de ren­contres entre un ques­tion­ne­ment socié­tal, des maté­riaux et un espace. 

En 2023, tou­chée par l’impact des indus­tries et la dis­pa­ri­tion de pra­tiques d’artisanes dans son pays d’origine, Mélis­sa Trao­ré crée “Màa­ri”, un pro­jet docu­men­taire artis­tique dont la res­ti­tu­tion prend la forme d’installations. Elle effec­tue­ra un tra­vail de recherche sur ce sujet avec Baï­lo Dial­lo, socio­logue, anthro­po­logue, ensei­gnant à l’Université de socio­lo­gie de Cler­mont-Fer­rand et pas­se­ra 3 mois en immer­sion avec ces arti­sanes. Le Musée Natio­nal du Came­roun est par­te­naire du pro­jet.

Mélis­sa Trao­ré fait par­tie du col­lec­tif Mimé­sis Arts Recherches Actions, un col­lec­tif de col­la­bo­ra­tion entre cher­cheuses, his­to­riennes et artistes. 

Elle expose régu­liè­re­ment en France et à l’étranger notam­ment à la Haye au Pays-Bas dans le cadre de l’Embassy Fes­ti­val édi­tion 2024 ou encore à l’Institut de Média­tion Cultu­rel et d’Art Contem­po­rain Métha­mor­pho­sis à Yaoun­dé au Came­roun. Elle par­ti­cipe éga­le­ment à diverses confé­rences et tables rondes et a été l’objet d’interviews por­tant sur les thèmes de “Mémoire et trans­mis­sion par le médium de l’art”, “Iden­ti­té afri­caine et art” ou encore “De la recherche à l’art”. 

1 “Lais­ser la trace de… ; Bar­bouiller” en Bam­ba­ra, langue du Mali

2 Mime­sis Arts Recheches Actions (en ligne) : https://mimesis-asso.fr/

3 Embas­sy Fes­ti­val (en ligne) : https://embassyfestival.com/

4 Trao­ré Mélis­sa. 2023. Entre­vue radio­pho­nique avec Alpha Bah. Radio Ylla, Stras­bourg. En ligne : https://www.youtube.com/live/XlQcIS9_prU?si=c5K2Bp4kssotmDy_

5 Trao­ré Mélis­sa. 2023. Entre­vue radio­gra­phique avec Nico­las Mer­lin. Radio Alti­tude, Auvergne Soli­da­ri­té Inter­na­tio­nale, Cler­mont-Fer­rand. En ligne : https://melissatraore.com/projet-maari/evenements/emission-auvergne-solidarites-internationales/  https://ausi.fr/

6 Trao­ré Mélis­sa. 2024. Entre­vue radio­gra­phique avec Char­ly Atan­ga­na. Radio Kalak, Yaoun­dé, Came­roun. En ligne : https://kalakkfm.com/